CTM du 22 mai 2014 : Déclaration CGT-FSU sur l’égalité professionnelle

Le contexte actuel

L’Etat devrait être exemplaire sur la mise en œuvre de l’égalité professionnelle femme-homme au sein de la Fonction Publique. Cependant, les politiques d’austérité menées par le gouvernement, ne permettent pas de porter une politique volontariste pour mettre fin aux inégalités. Elle tendent même à les aggraver (réforme des retraites, gel des salaires, baisse des effectifs, fermetures de services…).

Faire de l’égalité un enjeu prioritaire suppose que celui-ci soit pris en compte dans toutes les études, tous les rapports et négociations mis en place par le gouvernement et les directions ministérielles. Or le rapport du Conseiller d’État Bernard Pêcheur, qui a servi de base aux négociations sur les carrières et les  rémunérations ouvertes fin 2013 pour la Fonction publique, est muet sur l’égalité professionnelle. Ce rapport ignore le protocole égalité signé le 8 mars 2013 et le guide du Défenseur des droits sur une « évaluation non discriminante des emplois à prédominance féminine ». Pourtant les inégalités de rémunération perdurent dans la Fonction Publique : les écarts salariaux moyens entre femmes et les hommes sont de 12,1 % pour le versant territorial, 17,6 % pour la Fonction publique d’État, et 24 % pour le versant hospitalier (selon le rapport annuel fonction publique 2013). Faut-il encore rappeler que l’égalité salariale femme- homme serait un facteur de sortie de crise, puisqu’elle redonnerait du pouvoir d’achat aux femmes et abonderait les caisses de la protection sociale.

La réalité des inégalités femme / homme

On entend parler beaucoup de l’égalité femme -homme, mais celle-ci reste encore à conquérir et ce, malgré six lois successives et de nombreux accords.

Quelques faits caractéristiques de l’inégalité femme – homme au sein de nos ministères :

· Effectifs : seulement 37 % de femmes, soit un des ministères les moins mixtes de la fonction publique

· Les filières : ségrégations féminines dans la filière administrative, où les niveaux de classification, de rémunération (dont indemnitaire) et parcours professionnels sont les moins valorisés, alors même que les femmes sont en moyenne plus diplômées que les hommes.

· Précarisation : les femmes sont plus nombreuses dans les emplois non statutaires

· Les déroulements de carrière : plus d’obstacles et de difficultés pour les femmes quelque soit la filière et le corps. Plus on monte dans les catégories et les niveaux de responsabilités, moins les femmes sont présentes.

· Les temps et charges de travail : beaucoup plus de temps partiel pour les femmes. Encore mal vu pour les hommes

· L’articulation des temps : plus difficile pour les femmes ; interruptions de carrière plus nombreuses avec des répercussions sur le déroulement de carrière (promotions, primes, responsabilités…). Le désir d’interruption de travail des pères est souvent contrarié, empêché

· Sur les conditions de départ en retraite : les interruptions de carrière subis par les femmes empêchent nombre d’entre elles de partir avec une retraite à taux plein (départ en retraite différé et/ou niveau de pension minoré) ;

· Les stéréotypes en cours qui tendent à surdéterminer la place des femmes dans le travail ;

· Les violences au travail : elles sont souvent rendues invisibles, étouffées mais c’est une réalité.

Quelques chiffres pour illustrer ces faits :

o Les femmes représentent 59,1 % des emplois des trois fonctions publiques, mais seulement 27,6 % des 4 480 emplois supérieurs.

o Dans la Fonction publique d’Etat : La part des femmes parmi les dirigeants est de 21,4 %. Elle reste très faible au regard de la place majoritaire qu’elles occupent parmi les postes de cadre (58,1 % d’emplois civils de catégorie A sont occupés par des femmes).

o  Salaires : dans la FPE, les écarts de salaires moyens femme – homme sont d’environ 15 %. Cet écart s’accentue dans l’encadrement (près de 19 %) ; il est d’environ 10 % dans les professions  intermédiaires.

o  La retraite et le niveau de pension : en 2008 La pension de retraite moyenne des femmes est inférieur d’1/3 par rapport à celle des hommes (à actualiser). Les femmes diffèrent leur départ pour compenser les effets d’une carrière incomplète et bénéficier du taux plein.

o  RPS : parmi le salariat, 17 % des femmes disent avoir été victimes de violences verbales, 8.5 % de violences physiques et 2 % de harcèlement sexuel.

o  Le partage des temps en France : les femmes ont un temps contraint hebdomadaire de près de 14h supplémentaire par rapport aux hommes, d’où l’enjeu des charges de travail et respect des heures de travail légales.

Pour nous, l’enjeu de l’égalité est un enjeu de société.

De nombreuses réunions du groupe de travail sur l’égalité professionnelle ont eu lieu pour aboutir à une proposition qui à peu de choses près décline le protocole d’accord fonction publique sur l’égalité professionnelle.

Nous avons pris une part très active dans le groupe de travail et fait de nombreuses propositions, notamment :- que chaque service et établissement public élabore un rapport de situation comparée

– que soient élaborées des cohortes comparatives de déroulement de carrière femme/homme

– des moyens financiers identifiés dans le budget ministériel pour corriger les inégalités professionnelles

– l’engagement d’une concertation sur les moyens à mettre en place pour une reconnaissance égale des filières administrative et technique

– que les référents égalité professionnelle bénéficient d’une lettre de mission, de moyens pour accomplir leurs missions

En priorité, sur l’égalité salariale

Il s’agit de donner toute sa place aux femmes dans le monde du travail, de rétablir en particulier l’égalité salariale et professionnelle. Plusieurs leviers sont à actionner pour y parvenir et en cela, la traduction du protocole fonction publique dans notre ministère est considérée comme un point d’appui.

Pour établir l’égalité salariale, il y a nécessité d’agir sur les facteurs principaux qui l’entravent aujourd’hui :

· Promouvoir et agir pour la mixité F /H dans les filières, aussi bien administratives que techniques

· Harmoniser les grilles de classifications des corps administratifs et techniques selon les catégories, en considérant le niveau de diplôme requis et en tenant compte de l’élévation du niveau de qualification des agent-e-s

· Harmoniser par le haut les primes des filières administrative et technique

· Supprimer les inégalités de déroulement de carrière et le plafond de verre au sein des corps et entre corps de même catégorie.

· Agir sur les systèmes et mécanismes de gestion qui renforcent les inégalités, en particulier ceux qui conditionnent le déroulement de carrière et la rémunération

· Créer les conditions permettant d’éviter la concentration des temps partiels chez les femmes (lien avec les inégalités de salaires et les stéréotypes en cours)

· Prendre des mesures compensatoires pour supprimer les inégalités salariales et de pension (minimum retraite garanti, revalorisé et indexer sur le smic, neutralisation des interruptions de carrière liée à la maternité).

L’égalité nécessite d’autres mesures

L’égalité f / H ne se limitant pas à l’égalité salariale, nous demandons également l’application des mesures suivantes :

· Limitation des temps et charges de travail et encouragement à une répartition équilibrée des absences pour raisons familiales au travers d’une tolérance accrue dans la hiérarchie vis-à-vis des absences des hommes liées à des contraintes familiales (ex : valorisation du congé paternité)

· Une politique d’action sociale favorable à l’égalité professionnelle (élargissement du nombre de places en crèches, promotion du CESU, logement contingenté…)

· Identifier et lutter visiblement contre la discrimination pure liée aux stéréotypes, et contre les violences sexistes ou sexuelles

· La mise en place d’un dispositif d’écoute et d’accueil pour les agentes victimes de discriminations, ce dispositif pouvant être élargi aux autres modes de discriminations.

Le projet qui nous a été transmis est loin de refléter la richesse des débats et des propositions qui ont été formulés dans le cadre du Groupe de Travail. C’est pourquoi :

o nous formulons d’une part des amendements partant des échanges qui se sont tenus des ces GT pour enrichir votre projet ; amendements selon des axes et mesures correspondant au schéma du protocole d’accord Fonction Publique

o  D’autre part, nous insistons sur les modalités de mise en œuvre de ce projet, à savoir :

o Des engagements de votre part pour transcrire ce protocole (ou charte) en circulaire(s) d’application ministérielle(s) au sein des différents services et établissements publics sous tutelle du ministère (déclinant les différents axes) ;

o Un calendrier pour mettre en place un plan d’action concernant les différents axes du projet de protocole. Le plan d’action énoncera des mesures visant la suppression des écarts de salaire, sur la base des Rapports de Situation Comparée et des objectifs de progression ainsi que des indicateurs associés pour atteindre l’égalité professionnelle

o Des moyens humains et budgétaires pour permettre l’atteinte des objectifs : effectifs, formation, budget dédié, communication / publicité interne, ….

Nous sommes prêts à signer le projet mais nous demandons qu’il prenne la forme d’un protocole (celui-ci entrainant certaines obligations de suivi et d’évaluation) afin de marquer l’engagement du ministère sur l’enjeu de l’égalité professionnelle.

L’Etat devrait être exemplaire en matière d’égalité professionnelle. Notre ministère, qui a souvent pris part à diverses expérimentations en matière de gestion, d’organisation du travail et des services, peut prendre là toute sa part dans cette exemplarité, en donnant du sens à ce projet de texte et en se donnant les moyens d’obtenir des résultats dans sa mise en œuvre.

Il doit là aussi se fixer des objectifs ambitieux et s’en donner les moyens car l’égalité professionnelle femmes / hommes correspond à une aspiration forte de la part des agents.

Retrouvez le compte-rendu du CTM

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